Cours d’introduction à l’économie complet Par le Professeur MONDJELI MWA NDJOKOU Maître de Conférence et Agrégé des Facultés de Science Economique et de Gestion à l’ Université de Yaoundé II- Soa.

Objectif du Cours :

Fournir aux étudiants en sciences juridiques et politiques des connaissances générales sur l’économie.

CHAPITRE 0 : QU’EST-CE QUE L’ECONOMIE ?

Nous vivons dans un monde où l’économie est omniprésente : pas un jour sans que les prévisions de croissance, les chiffres du chômage ou du déficit public et le pouvoir d’achat des citoyens ne fassent l’objet d’un traitement dans les médias. Clef d’analyse de certains problèmes de société, la compréhension des rouages de l’économie constitue un impératif majeur pour tous les citoyens.

L’économie comme l’histoire, la psychologie, appartient à la grande famille des sciences humaines dont le point commun est d’avoir le même objet de l’étude : l’être humain. La finalité de la science économique a beaucoup évolué dans le temps depuis que les philosophes grecs ont fait œuvre de réflexion économique. L’économie est successivement apparue comme la science des richesses et la science de la rareté.

La science économique cherche à répondre aux questions qui ont une certaine incidence sur notre vie de tous les jours. Ces questions portent sur un certain nombre de sujets à savoir la production des biens et services, leur consommation, les salaires et les revenus, le chômage, l’inflation, les dépenses publiques, les impôts et la réglementation, le commerce international, la répartition de la richesse et la pauvreté, l’environnement etc. De ces différentes thématiques, peuvent découler les questions suivantes qui résument quelques préoccupations de la science économique ?

  • Comment les individus choisissent-ils les biens et les services qu’ils consomment et les moyens de production qu’ils utilisent ?
  • Qu’est-ce qui détermine le revenu de chaque individu ?
  • Quelles sont les causes du chômage ?
  • Pourquoi les prix montent-ils ?
  • Quelles sont, sur la vie économique d’un pays, les répercussions des impôts et des dépenses publiques ?
  • Pourquoi certains pays sont-ils pauvres et d’autres riches ?
  • Comment la richesse créée dans une économie est-elle repartie ?
  • Qu’est-ce qui expliquent la pauvreté et les inégalités entre les hommes ?
  • Quelle est l’incidence de l’environnement sur le comportement des individus en termes de consommation et de production ?
  • Comment le numérique affecte la vie interne des organisations, les relations des marchés et les pratiques des individus ainsi que la façon de penser et de conceptualiser les phénomènes organisationnelles et économiques ?

Dans un premier temps, l’objectif du chapitre est de donner une définition de la science économique. Dans un deuxième temps, le chapitre expose des notions de rareté, de choix et de coût d’opportunité. Dans un troisième, la question de la scientificité de la science économique est discutée. Dans un quatrième temps enfin, la méthode en science économique est abordée, méthode qui débouche sur la distinction entre la microéconomie et la macroéconomie.

Table of Contents

1. Définition

La première question qui se pose naturellement lorsque nous abordons un champ d’étude est sa définition même. Avant de donner la définition de la science économique, il semble important de rappeler que la science économique est une science jeune d’à peine trois siècles. En tant que science moderne, elle est née avec Adam Smith et son ouvrage majeur An inquiry into the Nature of Causes of the Wealth of the Nations paru en 1776.  Adam Smith, auteur britannique est donc considéré comme le père fondateur de la science économique. Mais dans la Grèce Antique, plusieurs pensées ont tenu des réflexions sur l’économie. Ainsi, le mot « économie », inventé en 1615 par Antoine de Montchrétien, vient des mots d’origine grecque « oïkos » (la maison) et « nomos » (l’ordre, la loi) qui signifient gestion du foyer, de la cité. L’économie est la science de l’administration de la cité, la science de la gestion de la rareté et, selon John Stuart Mill, la science pratique de la production et de la distribution des richesses. Lionnel Robins (1932) définit l’économie comme la science de l’étude des comportements humains en tant que relation entre les fins et les moyens limités ayant des usages alternatifs. D’après E. Malinvaud (1982), la science économique est : « la science qui étudie comment les ressources rares sont employées pour la satisfaction des hommes vivant en société. Elles s’intéressent d’une part aux opérations essentielles que sont la production, la distribution et la consommation des biens ; d’autre part, elle s’intéresse aux institutions (marché) et aux activités ayant pour objet de faciliter ces opérations ».

Le constat de départ de l’analyse économique est simple : les hommes éprouvent des besoins illimités, mais les ressources sont rares c’est-à-dire les ressources dont ils disposent pour les satisfaire n’existent qu’en nombre limité.

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       Les besoins humains sont illimités

Un besoin économique est définit comme un manque qui peut être satisfait par l’acquisition ou la consommation des biens et services. Keynes (1930) distingue deux catégories des besoins :

  • Ceux qui possèdent un caractère absolu, que l’on ressent quel que soit la situation des autres individus.
  • Ceux qui ont un caractère relatif c’est-à-dire ce que l’on éprouve au contact des autres.

•        Les biens et les ressources sont limités

L’économiste ne s’intéresse qu’aux biens rares, que l’on appelle les biens économiques et écarte du domaine d’étude les biens libres.

Un bien non économique ou bien dit « libre » est un bien qui est suffisamment disponible pour satisfaire tous les désirs possibles (le soleil, le vent, l’air, l’eau). Un bien économique est un bien rare ; c’est un bien pour lequel la quantité disponible est inférieure à la quantité demandée par les individus même si ce bien est donné gratuitement. Ils se caractérisent par le fait que certains biens nécessitent un sacrifice pour être produits. Parmi les biens économiques, on distingue les biens matériels (objets) et les biens immatériels (services), ou encore les biens de production (biens qui servent à produire d’autres biens) et les biens de consommation finale. Les biens de production se divisent en deux catégories à savoir les biens de consommation intermédiaire (matières premières par exemple) et les biens d’équipement (machines).

2. La rareté, le choix et le coût d’opportunité

A°- La rareté

Tout problème économique découle d’un fait simple et incontournable : l’impossibilité que les individus ont à satisfaire leurs désirs. L’on définit la rareté comme une situation où les besoins et les désirs dépassent les ressources dont on dispose pour les satisfaire. En fait les besoins sont illimités face à des ressources limitées et finies. L’on distingue en général trois catégories de ressources à savoir les ressources naturelles, les ressources humaines et les ressources en capital.

  1. Les ressources naturelles sont constituées de ressources minérales, des possibilités agricoles de la terre, mais aussi des ressources des mers, des océans etc.
  2. Les ressources humaines peuvent être de deux types à savoir le travail et l’entreprise ou la capacité d’entreprendre. Le travail constitue la contribution humaine aux processus de production. Le capital humain traduit la capacité productive des ressources de travail. Il reflète l’accumulation des connaissances et des aptitudes d’un individu : savoir, expérience, talent, santé etc. L’entreprise ou la capacité à entreprendre consiste à la capacité à introduire de nouveaux produits, de nouvelles techniques de production, de nouvelles activités etc.
  3. Les ressources en capital comprennent l’ensemble des biens, qui combinés au travail, servent à la production. Ces ressources comprennent les machines d’une unité de production, les locaux d’une entreprise, les logiciels comptables (capital immatériel), les voies ferrées etc.

B°- Le choix

Le problème de la rareté force à faire des choix (on parle également d’arbitrage). Devant l’impossibilité d’obtenir ce qu’on désire, il faut choisir entre les possibilités qui s’offrent. De ce fait, certains désirs seront satisfaits et d’autres non. Les choix concernent par exemple le travailleur qui arbitre entre travail et loisir, le consommateur qui achète un bien (un smartphone) plutôt qu’un autre (un ordinateur portable), l’entreprise qui choisit de produire tel bien (un disque dur) ou tel service (paiement électronique). La science économique est encore appelée la science des choix ou la science de la décision.

C°- Le coût d’opportunité

Le choix implique les opportunités et les alternatives sacrifiées. A titre d’illustration, quand vous choisissez de lire ce chapitre, vous sacrifiez la possibilité de faire autre chose comme voir la télévision. La plus grande opportunité ou alternative sacrifiée est connue sous le nom de coût d’opportunité. Les économistes appellent coût d’opportunité le prix payé à chaque fois que, face à des ressources limitées on doit faire un choix. Le coût d’opportunité d’une décision représente la valeur de la meilleure possibilité à laquelle on renonce par cette décision. Le coût d’opportunité se mesure à cette « valeur de renonciation ». Mais les coûts d’opportunité que l’on supporte ne résultent pas toujours de nos propres décisions. Ce sont parfois les décisions des autres qui imposent des coûts d’opportunité.

3. La question de la scientificité de la science économique

La science économique, comme toutes les autres sciences de la société (sciences sociales), se distingue de la physique ou de la biologie par l’appréhension de systèmes plus complexes et plus instables (la maîtrise du comportement des hommes), conduisant à des lois empiriques plus fragiles et plus éphémères. Tout comme les sciences de la nature, elle se distingue de la linguistique ou de l’anthropologie par sa volonté de transformer les systèmes qu’elle étudie.

Mais de manière récurrente, la question de la scientificité de l’analyse économique a été posée. Une science se définit comme un exercice de pensée sur les objets. Cela signifie que pour prétendre un à statut de science, l’économie doit posséder d’une part, un objet d’étude qui lui est propre et d’autre part qu’elle utilise une démarche scientifique c’est-à-dire bâtir des modèles théoriques à partir d’hypothèses véritablement scientifiques, lesquelles pourront être testées en confrontant les modèles à la réalité.

En effet, l’analyse scientifique commence par des hypothèses. Karl Popper (1963) indique qu’une proposition devient scientifique quand elle peut être réfutée, c’est-à-dire qu’il est possible de la confronter aux faits. Une hypothèse scientifique est donc une proposition qui comporte en elle la possibilité de sa propre réfutation (la parabole du cygne noir). Cette analyse scientifique se prolonge dans l’expérimentation. Le problème de la science économique vient du fait que l’expérimentation apparaît difficile. Mais cette expérimentation est souvent aussi difficile pour les sciences « dures » pour lesquelles les expériences ne sont pas toujours envisageables (clonage humain, essais nucléaires).

4. La méthode de la science économique

A°- Les hypothèses, les lois et modèles en sciences économiques

Les économistes font apparaître des lois qui semblent gouverner le comportement des agents économiques. Une loi est fondée sur des hypothèses plus ou moins contraignantes qui représentent des simplifications de la réalité. Hypothèses et lois permettent ainsi de construire des modèles qui donnent une représentation théorique du fonctionnement de l’économie. Ces modèles sont confrontés aux faits. Ainsi, la validité d’une théorie repose sur la capacité de ses conclusions à expliquer les faits.

B°- L’analyse théorique versus l’analyse empirique

La science économique utilise deux types d’analyse à savoir l’analyse théorique et l’analyse empirique.  Dans l’analyse théorique, le raisonnement est inductif. La méthode inductive propose des généralisations à partir d’une masse des données découlant de l’expérience. Les données sont collectées sans préalablement formulées des hypothèses et les explications sont dérivées de ces données par généralisation des faits observés. Par contre, dans l’analyse empirique, on cherche à vérifier les hypothèses et les conclusions de la théorie. Le raisonnement est déductif. En effet, l’économiste, part des concepts et des théories acceptées, et cherche simplement à vérifier certaines hypothèses.

C°- L’économie positive versus l’économie normative

L’économie positive cherche à déterminer ce qui est ; elle explique donc pourquoi les choses sont ce qu’elles sont ; elle vise ainsi à montrer le monde tel qu’il est. L’analyse normative par contre cherche à définir ce que doivent être les choses et les comportements, à expliquer comment doit être le monde. Elle fait référence aux jugements et aux opinions. Seule la démarche positive relève de la science ; l’économie normative est trop influencée par des valeurs que l’on cherche à respecter.

D°- La microéconomie et la macroéconomie

Les sciences sociales opposent presque toujours des conceptions holistes et des conceptions individualistes. En tant que science sociale, l’économie n’y échappe pas. L’individualisme méthodologique est une méthode d’analyse des faits économiques et sociaux qui part du principe que les phénomènes étudiés peuvent être expliqués à partir des comportements individuels. Le holisme est la méthode d’analyse qui considère que les comportements individuels s’inscrivent dans un contexte global prédéterminé (les normes et les règles d’une société, la catégorie sociale d’appartenance etc.). En conséquence, l’étude du contexte global est nécessaire pour comprendre les actes individuels. L’individualisme méthodologique considère que les faits sociaux sont la résultante non voulue des comportements individuels, alors que le holisme considère que c’est l’existence préalable de l’organisation sociale qui détermine les décisions individuelles. En science économique, ce débat renvoie à l’opposition entre microéconomie et macroéconomie.

a°- La microéconomie

La microéconomie relève de l’individualisme méthodologique. Elle a pour objet l’étude des comportements des agents économiques pris individuellement à savoir les consommateurs et les producteurs. La microéconomie est une science explicative et normative. Elle est explicative car elle rend compte des comportements des agents et de l’interaction entre ces agents. Elle est une science normative puisqu’elle étudie les modalités les plus favorables pour organiser la production, la distribution et la consommation des biens et services. La démarche de l’analyse microéconomique repose sur deux hypothèses fondamentales que sont l’hypothèse de la rationalité des agents économiques et la suprématie de l’échange marchand.

  • Selon le principe de rationalité, les agents économiques sont toujours guidés par le souci de maximisation de leur satisfaction.
  • L’hypothèse de la suprématie de l’échange marchand signifie que la microéconomie met en avant l’échange marchand c’est-à-dire celui qui se réalise sur un marché.
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b°- La macroéconomie

La macroéconomie relève du holisme. Elle étudie donc le fonctionnement global de l’économie et s’intéresse aux relations entre les grandeurs globales appelés « agrégats » comme la consommation globale, le volume total de l’emploi, la production globale, l’investissement global etc. Elle s’attaque également aux indices globaux tels que le taux d’inflation, le taux de chômage etc.

Conclusion

La science économique appartient à la grande famille des sciences sociales ; elle se définit par son objet. Au fil du temps, elle est apparue successivement comme la science de l’accumulation des richesses et la science de la rareté. Du fait de la rareté, la science économique est une science des choix et de la décision.

La science économique se définit également par sa méthode ; elle étudie les comportements humains par l’observation, la formulation des hypothèses, l’établissement des lois et la construction des modèles théoriques. Elle s’efforce de proposer une approche positive des phénomènes en privilégiant l’individualisme méthodologique ou le holisme ; cette distinction fonde l’opposition entre la microéconomie et la macroéconomie.

CHAPITRE 1 : L’ACTIVITE ECONOMIQUE

L’activité économique est caractérisée soit du côté de l’offre des biens et services soit du côté de la demande des biens et services. Du côté de l’offre des biens et services, l’activité économique est caractérisée par la production des biens et services qui résulte de la combinaison des facteurs de production (le capital, le travail et dans une moindre mesure la terre) d’une part et la vente des biens et services d’autre part. Du côté de la demande, l’activité économique est caractérisée par l’achat des biens et services.

L’objet de ce chapitre est d’identifier les acteurs et opérations de l’activité économique, de schématiser cette activité économique et d’en donner une mesure.

1. Les agents économiques

L’activité économique est exercée par les êtres humains, agents organisés ou non qui jouissent d’une autonomie de décision. Face au grand nombre d’agents économiques que l’on peut repérer au sein de la nation, il apparaît souhaitable de les regrouper par catégories sensiblement homogènes appelées secteur institutionnel. Un secteur institutionnel est défini comme un regroupement d’agents économiques ayant un comportement analogue. L’on distingue six secteurs institutionnels résidents que sont : les sociétés et quasi sociétés non financières, les ménages, les administrations publiques, les instituts sans but lucratif aux services des ménages (ISBLSM) ou administrations privées, les institutions financières, les compagnies d’assurances. A côté de ces six secteurs institutionnels, on a le reste du monde.

A°- Les sociétés non financières

Ce secteur comprend l’ensemble des unités institutionnelles dotées d’une personnalité juridique dont la fonction principale est la production des biens ou des services marchands non financiers. Sont concernées les sociétés et quasi-sociétés, qu’elles soient privées ou publiques. Une quasisociété n’est pas dotée d’une personnalité juridique mais elle doit tenir comptabilité complète et jouir de l’autonomie de décision. Elles utilisent des facteurs de production qu’elles rémunèrent (salaires et profits, les revenus des facteurs de production). Elles achètent et vendent des biens à d’autres entreprises, que l’on appelle consommation intermédiaire. Elles vendent également les biens et services qu’elles produisent aux ménages pour leur consommation. Leurs ressources proviennent de la vente des biens et services.

B°- Les ménages

Un ménage est constitué par tout individu ou groupe d’individus :

  • qui vivent sous le même toit
  • qui ont une consommation commune
  • qu’ils aient ou non un lien de sang ou de parenté.

On distingue ainsi entre :

  • un ménage ordinaire : une personne vivant seule, des personnes vivant en famille (couple sans ou avec enfants) ;
  • un ménage collectif : il s’agit de la population de collectivités (internat, prison, caserne, couvent, …)

Leur fonction principale est la consommation des biens et services. En tant qu’entrepreneurs individuels, les ménages peuvent également produire des biens et services marchands. L’entreprise individuelle est une unité économique qui ne possède pas de personnalité juridique distincte de celle de son exploitant (agriculteurs, petits commerçants, artisans, professions libérales etc.). Il y a donc confusion du patrimoine de l’entreprise et de celui du ménage auquel le ménage appartient. En outre, il est souvent difficile de distinguer certains flux économiques relatifs à l’entreprise de ceux propres aux ménages. Le secteur des ménages comprend six sous-secteurs : les employeurs, les salariés, les bénéficiaires de revenu de la propriété, les bénéficiaires de pension, les bénéficiaires d’autres revenus de transferts et autres ménages (qui comprend toutes les personnes vivant en permanence en collectivité). Leurs ressources proviennent de la rémunération des facteurs de production (salaires, revenus de la propriété), transferts effectués par les autres secteurs institutionnels et les revenus de la vente.

C°- Les administrations publiques

Les administrations publiques (APU) regroupent les unités institutionnelles dont la fonction principale est de produire des services non marchands destinés aux autres secteurs institutionnels ou d’effectuer des opérations de redistribution du revenu ou du patrimoine. Elles tirent leurs ressources de contributions obligatoires (impôts, taxes, cotisations sociales) effectuées par les autres secteurs et reçues directement ou indirectement. Ce secteur institutionnel est subdivisé en trois sous- secteurs à savoir : l’administration centrale, l’administration locale et l’administration de sécurité sociale. L’administration centrale (Etat et organismes divers d’administration centrale) a une compétence qui s’étend sur tout le territoire économique. La compétence des administrations publiques locales s’étend seulement sur une partie du territoire. Les administrations de sécurité sociale regroupent les administrations (centrale ou locale) dont l’activité principale consiste à fournir des prestations sociales ainsi que les hôpitaux.

D°- Les administrations privées ou institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM)

Le secteur des ISBLSM regroupe les unités dotées de la personnalité juridique qui servent les ménages en leur procurant des services non marchands. Il s’agit des associations, des partis politiques, des syndicats, des églises etc. Lorsque ces institutions sont de faible importance, leurs opérations restent confondues avec celle des ménages. Leurs ressources proviennent des contributions volontaires, des dons et des subventions. Toutefois, si plus de 50% de leurs ressources proviennent des subventions, ces organismes privés doivent être reclassés dans le secteur des administrations publiques. Aussi, si la vente de leurs produits procure plus de 50% de leurs revenus, ils doivent être considérés comme des sociétés et quasi sociétés non financières.

E°- Les institutions financières

Les sociétés financières regroupent les unités dont la fonction principale est de financer (c’est-à-dire collecter, répartir et transformer les moyens de paiement) ou de gérer ces moyens de financement. En effet, ce sont les unités qui fournissent principalement des services d’intermédiation financière. On y trouve la Banque Centrale, les autres institutions financières monétaires (banques, caisse d’épargne, sociétés financières etc.) et les autres intermédiaires financiers (sociétés de crédit-bail etc.). Les fonds proviennent des engagements financiers contractés (les dépôts). Ce secteur comprend également le sous-secteur des auxiliaires financiers qui comprend les courtiers, les sociétés de gestion de portefeuille, les bourses de valeur mobilières, ainsi que les autorités de contrôle des intermédiaires financiers et des marchés financiers.

F°- Les sociétés d’assurance

Ce secteur (sous-secteur des sociétés financières dans certains ouvrages) comprend les unités dont la fonction principale est de garantir contre la survenance d’un risque. Leur activité principale est donc la mutualisation des risques. Leurs ressources proviennent des cotisations sociales et des primes contractuelles.

N.B : Dans l’ancien système, les entreprises d’assurance constituaient un secteur mais l’évolution des métiers respectifs a obscurci la distinction entre institutions financières et assureurs.

G°- Le reste du monde

Tous les échanges ne se font pas à l’intérieur du pays parce que la vie en autarcie est une utopie. Un agent fictif est alors généralement introduit pour permettre de représenter l’ouverture internationale, c’est-à-dire les échanges avec les agents d’autres pays, et cet agent est le reste du monde. Il ne s’agit pas de faire les comptes complets du reste de la planète. Mais sous l’appellation reste du monde, on regroupe dans un même ensemble de comptes les opérations entre unités résidentes et unités non résidentes.

2. Les opérations économiques

La comptabilité nationale distingue trois catégories d’opérations entre les agents économiques à savoir opérations sur les biens et les services, les opérations de répartition et les opérations financières.

A°- Les opérations sur biens et services ou opérations de production

Les opérations sur biens et services indiquent l’origine et l’utilisation des biens et services. Dans une économie nationale, les biens et services proviennent de la production nationale et des importations. Ces biens et services sont utilisés à la consommation, à l’investissement et à l’exportation. Le solde de la production et des importations qui n’est pas utilisé peut-être stocké (variation positive des stocks). On distingue cinq types d’opérations sur biens et services : la production, la consommation intermédiaire, la consommation finale, la formation brute du capital, les exportations et les importations.

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a°- La production

La production est définie comme l’activité qui « combine des ressources en main d’œuvre, capital et biens et services pour fabriquer des biens et fournir des services » », et comme le résultat de cette activité. En général, on distingue deux types de production à savoir la production marchande et la production non marchande. La production marchande est la production qui est vendue ou destinée à être vendue à un prix économiquement significatif. Un prix économiquement significatif est le prix qui permet de couvrir plus de la moitié des coûts de production. La production marchande est évaluée au prix de base. Le prix de base est la recette effective par unité produite : montant que le producteur reçoit de l’acheteur pour chaque unité du produit, moins les impôts sur les produits, plus les subventions sur les produits. La production non marchande est celle qui fournit soit gratuitement soit à un prix économiquement non significatif. Elle est exclusivement une production de services. Par convention, ces services n’ayant pas de prix sur le marché (justice, armée, enseignement, etc.) sont évalués aux coûts de production supportés.

b°- La consommation intermédiaire

La consommation intermédiaire désigne la valeur du produit consommé dans différents processus de production. Les produits utilisés comme consommation intermédiaire sont incorporés dans les produits plus élaborés (par exemple les pneus utilisés pour la production d’automobiles) ou détruits au cours du processus de production (par exemple le maïs dans la production de la bière). Les services peuvent aussi être utilisés comme consommation intermédiaire ; par exemple, les services d’un avocat ou les services informatiques achetées par une entreprise. Pour qu’il y ait consommation intermédiaire, l’incorporation ou la destruction doivent être totales. Elle désigne donc la valeur des biens et services utilisés dans le processus de production qui sont soit totalement détruits, soit totalement incorporés dans les produits plus élaborés.

NB : La consommation de biens de capital fixe (machines et bâtiments) utilisés dans le processus de production et qui ont une durée de plusieurs années ne fait pas partie de la consommation intermédiaire. Ils sont classés lors de leur acquisition dans la formation brute du capital fixe et leur usure tout au long de la durée de vie constitue la consommation du capital fixe.

c°- La consommation finale

La consommation finale est définie comme la valeur des biens utilisés pour la satisfaction directe des besoins individuels des ménages individuels ou collectifs. On suppose que ces produits ne sont pas stockés mais consommés au moment de l’achat, même lorsqu’ils sont durables. Par convention, seuls les ménages, les APU et les ISBLSM ont une consommation finale. La comptabilité nationale dégage la notion de consommation finale effective (CFE) qui recouvre l’ensemble des biens et services que les unités institutionnelles consomment effectivement quel que soit leur mode de financement. La CFE des ménages (ou consommation finale individualisable) recouvre l’ensemble des produits dont disposent individuellement les ménages, y compris ceux qui ont été fournis en nature par les APU et les ISBLSM et n’ont pas fait l’objet de dépenses de consommation de leur part. La CFE des APU (ou consommation finale collective) recouvre exclusivement des produits fournis à collectivité. La CF des APU se décompose en effet en CF collective – qui bénéficie simultanément à tous les membres d’une communauté ou à un sous-groupe spécifique de celle-ci – (ses services publics généraux, défense, sécurité, recherche et développement, activités législatives etc.) – et CF individuelle dont les bénéficiaires (les ménages) peuvent être clairement identifiés (dépenses d’enseignement, de santé, de sécurité sociale, œuvres sociales, sport et loisirs, etc.). Par convention, toute la CF des ISBLSM est individualisable.

d°- La formation brute du capital 

La formation brute du capital est subdivisée en :

  • Formation brute du capital fixe (FBCF) ou investissement, qui est la différence entre les acquisitions et les cessions d’actifs fixes. L’acquisition n’est pas nécessairement un achat ; elle peut être le résultat d’une production pour emploi final propre (entreprise produisant un bâtiment ou un logiciel pour elle-même. L’actif est fixe non pas parce qu’il est physiquement durable mais parce qu’il peut « être utilisé de façon continue ou répétée » pendant plus d’un an. Les actifs fixes peuvent être corporels (machines, logements et autres bâtiments ou ouvrage de génie civil etc.) ou incorporels (acquisitions de logiciels, les acquisitions d’œuvres créatives, littéraires ou artistiques etc.). L’on décompose la FBCF en deux grandeurs : la formation nette du capital fixe ou investissement net (FNCF) et la consommation de capital fixe ou amortissement (CCF). La FBCF des ménages est essentiellement représentée par l’achat des logements neufs et les grosses réparations des logements anciens.
  • Variations des stocks, qui correspond à la différence pour une année, entre les entrées et les sorties des marchandises en stock. Sont concernés, les biens autres que ceux de capital fixe à savoir les matières premières et biens intermédiaires non utilisés, biens produits semi-finis, biens produits non vendus. Elle n’est pas la variation de la valeur des stocks au cours de l’année. La valeur des stocks d’un produit à une date donnée est une valeur potentielle c’est-à-dire la somme que l’on récupérerait si on vendait tout le stock. Si les entrées sont supérieures aux sorties, la variation des stocks est positive ; dans le cas inverse, elle est négative.

e°- Les exportations et les importations

Les exportations sont les biens et services fournis par les unités résidentes aux unités non résidentes. Les importations sont des biens et services fournis par les unités non résidentes aux unités résidentes. Il n’est pas nécessaire que les produits franchissent la frontière du territoire pour qu’ils soient exportés (ou importés). L’achat d’une paire de chaussure ou d’un repas au restaurant par un touriste étranger est par exemple une exportation.

B°- Les opérations de répartition

Les opérations de répartition décrivent la manière dont la richesse créée au cours du processus de production est répartie. L’on distingue deux opérations de répartition à savoir la répartition primaire et la répartition secondaire ou redistribution.

a°- La répartition primaire

La répartition primaire s’intéresse à la formation des revenus issus directement du processus de production et à leur répartition entre la rémunération des salariés, le revenu des actifs de production (excédent d’exploitation et revenus mixtes), les revenus de la propriété et les revenus des administrations publiques (impôts sur la production et des importations nets des subventions).

La rémunération des salariés

Le poste rémunération des salariés correspond aux versements effectués par les employeurs en espèces et en nature au bénéfice des salariés. Il comporte :

  • les salaires et les traitements divers à l’instar des primes reçues ;
  • les avantages en natures (logement, voitures de service, etc.) ;
  • les cotisations sociales à la charge des employeurs et qui sont versés par ces derniers aux organismes de sécurité sociale (CNPS) ;
  • les cotisations sociales imputées à la charge des employeurs et qui représentent la contrepartie des prestations sociales fournies directement aux employés (versement de salaire en cas de maternité).

Les revenus de la propriété

Ils sont reçus par les propriétaires de l’actif financier ou corporel en échange de leur mise à disposition à d’autres agents. La rubrique est composée d’éléments suivants :

  • les intérêts qui rémunèrent les détenteurs d’un actif financier (actions, obligations) § les loyers de terrains et de gisement.

Les impôts et subventions liés à la production et à l’importation

Les impôts sur production et l’importation sont des versements obligatoires effectués sans contrepartie à des administrations publiques. Les subventions sont des transferts effectués par des administrations publiques au bénéfice des producteurs.

b°- Les opérations de redistribution

Les mécanismes de redistribution ont pour effet de modifier la répartition primaire des revenus. Ce sont des flux de revenus non directement liés à la production. La redistribution est essentiellement effectuée par les transferts. Les transferts sont des opérations dans lesquelles une unité institutionnelle donne un bien, un service ou un actif sans contrepartie à une autre unité institutionnelle. Il existe trois catégories de transferts :

  • les impôts sur le revenu et le patrimoine ;
  • les cotisations et prestations sociales (autres que les transferts sociaux en nature) ; les autres transferts courants.

C°- Les opérations financières

Les opérations financières recouvrent l’ensemble des opérations entre agents à capacité de financement et agents à besoin de financement. Elles montrent comment les agents à besoin de financement trouvent les ressources financières auprès des agents à capacité de financement.  Parmi les opérations financières, on distingue :

  • Celles qui portent sur les instruments de paiement (opérations qui portent sur les moyens de paiement directement utilisables tels que les devises, l’or, la monnaie nationale)
  • Celles qui concernent les instruments de placement (opérations qui portent sur une réserve des moyens de paiement directement utilisables tels que les actions, les obligations, les bons de trésor etc.)
  • Celles qui ont trait aux instruments de financement (opérations sur les crédits à court terme, moyen terme et long terme).
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3. Le circuit économique

De façon simplifiée, l’activité économique peut être schématisée de la manière suivante. Ce schéma est connu sous le nom de circuit économique. Dans ce circuit, on considère uniquement le marché des biens et services.

Les ménages offrent une force de travail aux entreprises et reçoivent en contrepartie un salaire ; ce revenu leur permet de payer les impôts et les cotisations sociales à l’Etat ; ce qui leur donne la possibilité de bénéficier des biens et services non marchands (police, infrastructures publiques etc.) et des transferts. Les revenus de ménages leur permettent également de pouvoir exprimer une demande des biens et services ; la partie du revenu non-consommée des ménages est offerte aux institutions financières sous forme d’épargne qui reçoivent en retour des crédits.

S’agissant des entreprises, elles trouvent financement des crédits offerts par les institutions financières ; ces crédits leurs permettent d’exprimer une demande d’investissement sur le marché des biens et services. Ainsi, grâce au travail des ménages, les entreprises produisent des biens et services. Les revenus issus de la vente de la production leur permettent de payer les salaires, les impôts et les cotisations sociales et de bénéficier des biens et services non marchands de l’Etat.

Par ailleurs, les institutions financières bénéficient également des biens et services non marchands de la part des administrations publiques. Aussi, l’économie nationale entretient des relations avec le reste du monde à travers les opérations d’exportations et d’importations.

4. Mesure de l’activité économique

A partir des opérations des agents économiques et de leur représentation synthétique, l’on peut faire une analyse de l’activité économique nationale. Les instruments d’analyse sont fournis par la comptabilité nationale. La comptabilité nationale est une représentation chiffrée et synthétique de l’activité économique nationale. Les principaux instruments d’analyse sont appelés les agrégats. Les agrégats sont des grandeurs synthétiques qui mesurent les résultats de l’activité économique en termes de production et de revenu.

L’agrégat le plus utilisé est le PIB (Produit Intérieur Brut). Le PIB est la principale mesure de la production nationale. Le PIB est défini comme l’ensemble des biens et services produits dans un pays par les résidents au cours d’une période donnée généralement un an. Si l’on s’intéresse à la production des nationaux d’un pays, l’on calcule le PNB (Produit National Brut) qui mesure la production des biens et services des nationaux qu’ils soient à l’intérieur du pays ou dans le reste du monde.

En termes de revenu, le RNB (Revenu National Brut) et le RNDB (Revenu National Disponible Brut) sont les principaux agrégats économiques. En effet, la production des unités résidentes donne lieu à une distribution des revenus primaires. Mais cette distribution n’est pas égale entre les résidents et les agents économiques du reste du monde. On obtient donc le RNB à partir du PIB de la manière suivante : RNB= PIB+revenus des facteurs en provenance du reste du monde – revenus de facteurs versés au reste du monde. Si l’on considère la redistribution, on définit le RNDB obtenu de la manière suivante : RNDB= RNB+transferts reçus du reste du monde – transferts versés au reste du monde.

Conclusion

L’activité économique met en relation différents types d’agents économiques (SQSNF, les ménages, les APU, les administrations privées, les institutions financières et les compagnies d’assurance) qui effectuent entre eux des flux d’opérations de production, opérations de répartition et opérations financières. Ces flux d’opérations suivent un certain circuit économique. La mesure de cette activité économique permet de définir des agrégats économiques tels que le PIB, le PNB, le RNB et le RNDB.

CHAPITRE 2 : LES MARCHES ET FORMATION DES PRIX

La rencontre entre la demande et l’offre s’effectue sur un marché. Un marché peut donc être défini comme le lieu de rencontre, pas nécessairement physique, entre l’offre et la demande. Il se caractérise par la manière dont s’opère cette rencontre entre l’offre et la demande, pour aboutir à une quantité échangée et à un prix. Il existe différents types de marché. Il y a tout d’abord la classification des marchés suivant l’espace géographique concerné ; on peut donc avoir le marché local, le marché national, africain, européen et international. On peut également distinguer les marchés suivant l’objet de l’échange : les marchés des biens et services, le marché du travail, le marchés des capitaux, le marché du crédit etc.

1. L’offre et la demande

L’offre et la demande résultent respectivement les comportements des entreprises (vendeurs) et des consommateurs (acheteurs sur un marché).

A°/- La demande

La quantité demandée d’un bien ou d’un service représente la quantité du bien ou du service que les consommateurs envisagent acheter à un prix déterminé au cours d’une période donnée. La demande ne correspond pas aux désirs des individus. La quantité demandée ne correspond pas nécessairement pas à la quantité qu’on achète. Il existe une différence entre la quantité demandée et la quantité achetée. La quantité demandée d’un bien ou d’un service dépend de plusieurs facteurs dont voici les principaux : le prix du bien, le prix des autres biens, le revenu des consommateurs, la population, les préférences des consommateurs.

S’agissant du prix du bien, la loi de la demande stipule que toute chose étant égale par ailleurs, la quantité demandée d’un bien diminue au fur et à mesure que son prix augmente. La quantité demandée d’un bien dépend du prix de ce bien mais également des prix des autres biens. L’influence des prix des autres biens permet de faire la distinction entre bien substitut et bien complémentaire. On appelle bien substitut un bien qui peut être utilisé à la place d’un autre.  Un bien complémentaire est un bien qui est consommé avec un autre. Le revenu du consommateur agit également sur la quantité demandée des biens. En effet, lorsque leurs revenus augmentent, les consommateurs augmentent en général la quantité demandée de la plupart des biens. Les biens pour lesquels la demande s’accroit avec le revenu sont appelés les biens normaux. Par contre les biens pour lesquels la demande baisse lorsque le revenu augmente sont appelés les biens inférieurs. La population a aussi un effet positif sur la demande des biens. Plus la population augmente, plus la demande de tous les biens croit. Enfin, les préférences influencent aussi la demande des biens. Les préférences désignent l’attitude, en termes de goûts, des consommateurs pour les biens et services. Les préférences ne peuvent pas être observées directement ; l’on ne peut connaître avec exactitude les préférences des consommateurs. De manière schématique, la courbe de demande se présente de la manière suivante :

Figure 2

B°/- L’offre

La quantité offerte d’un bien représente la quantité que les producteurs ont l’intention de vendre au cours d’une certaine période compte tenu du prix qui prévaut sur le marché. La quantité offerte n’équivaut pas nécessairement à la quantité qui sera vendue ou achetée. Les consommateurs peuvent contrecarrer les plans de vente des entreprises en achetant moins que la quantité planifiée par les entreprises. Plusieurs facteurs expliquent la quantité offerte d’un bien : le prix du bien, les prix des autres biens, les prix des facteurs de production et la technologie disponible.

L’effet du prix du bien sur l’offre permet d’énoncer la loi de l’offre. La loi de l’offre stipule que :  toutes choses étant égales par ailleurs, quand le prix d’un bien s’élève, la quantité offerte de ce bien s’élève également. Les prix des autres biens peuvent influer sur l’offre d’un bien. Une distinction est également faite entre biens substituts et biens complémentaires. Une augmentation du prix d’un bien substitut de production entraine une diminution de l’offre ; toute augmentation du prix d’un bien complément provoque une augmentation de l’offre de l’autre bien complément. Les prix des facteurs de production qui entrent dans la fabrication d’un bien auront un effet important sur l’offre de ce bien. Ainsi, une hausse des prix de la main d’œuvre et du capital utilisés dans la production d’un bien conduit à la diminution de l’offre de ce bien. Enfin, en réduisant la quantité utilisée des facteurs de production ainsi que leurs prix, le progrès technique permet aux producteurs d’abaisser leurs coûts de production et d’augmenter leurs offres. Graphiquement, la courbe d’offre se présente comme suit :

Lire Aussi :  COURS DE DROIT FISCAL GENERAL (PDF)

Figure 3

2. L’équilibre du marché et la formation des prix

Un équilibre est définit comme une situation où les forces opposées se compensent réciproquement. Un prix d’équilibre est le prix auquel la quantité demandée est égale à la quantité offerte. Si le prix est trop élevé, la quantité offerte dépasse la quantité demandée (offre excédentaire ou surplus). Inversement, si le prix est trop bas, la quantité demandée excède la quantité offerte (demande excédentaire ou pénurie). Il existe un seul prix pour lequel la quantité offerte est égale à la quantité demandée. Graphiquement, l’équilibre sur le marché des biens et services se présente comme suit :

Figure 4

3. Les différents types de marché

A°/- Le marché de concurrence pure et parfaite

Les économistes néoclassiques ont proposé une formalisation d’un marché idéal appelé marché de concurrence pure et parfaite.

  1. Définition

Un marché de concurrence pure et parfaite est un marché devant satisfaire les cinq conditions suivantes : l’atomicité de l’offre et de la demande, la libre entrée et sortie sur le marché, la transparence sur le marché, l’homogénéité du produit et des facteurs de production, la mobilité des facteurs de production.

L’atomicité de l’offre et de la demande suppose l’existence d’une multitude d’offreurs et de demandeurs de telle sorte que qu’aucun d’entre eux ne puisse influencer le marché i.e les prix. La libre entrée sur le marché renvoie à l’inexistence de restrictions à l’entrée ; ainsi la concurrence n’est pas figée. D’après le critère de la transparence du marché, tous les acteurs du marché bénéficient d’une information parfaite sur les conditions de marché (en particulier les prix). L’homogénéité du produit suppose que les produits échangés sur le marché sont identiques de telle sorte que la concurrence ne peut porter que sur les prix. La mobilité des facteurs de production s’explique par le fait que les facteurs de production peuvent se déplacer, de manière à ce que chaque entreprise puisse profiter des mêmes conditions de production.

  1. La formation du prix sur le marché de concurrence pure et parfaite

Le fonctionnement du marché de CPP résulte de la confrontation de l’offre (la somme des offres individuelles) et de la demande (la somme des demandes individuelles) pour chaque produit qui détermine un prix d’équilibre. Ce prix est unique et s’impose aux agents économiques comme sous l’effet d’un ordre naturel (« la main invisible chez l’économiste classique Adam Smith ou plus tard le commissaire-priseur de Léon Walras). Les offreurs et les demandeurs sont des « Price Taker » sur ce marché. Le seul choix qui s’offre aux vendeurs et aux acheteurs réside dans celui de la quantité à acheter ou à vendre. Dans un tel environnement, tout changement affectant l’offre et la demande conduit nécessairement et rapidement à un nouvel équilibre caractérisé par un nouveau point d’équilibre.

Supposons par exemple que la demande est supérieure à l’offre. Cela correspond à un prix faible. Dans ce cas, les demandeurs qui ne pourraient pas acheter le bien sont prêts à le payer plus cher. Symétriquement les offreurs veulent bien mettre plus de biens sur le marché si les prix augmentent. Un nouveau prix plus élevé va donc émerger, les offreurs pouvant profiter d’un prix plus élevé puisque de nombreux acheteurs sont prêts à payer ce prix. Et ainsi de suite jusqu’au prix d’équilibre p* pour une quantité d’équilibre q*.

Les économistes classiques et néoclassiques, à travers le marché de concurrence pure et parfaite, postulent donc la flexibilité des prix comme pivot central de leur analyse.

B°/- Le marché de concurrence imparfaite

De manière générale, les marchés ne respectent pas les conditions du marché de concurrence pure et parfaite. Ainsi la concurrence imparfaite se rencontre à chaque fois qu’une condition de la concurrence pure et parfaite n’est pas respectée.

  1. Les entraves aux hypothèses de la concurrence pure et parfaite

Le tableau suivant résume les entraves possibles à la réalisation des hypothèses de la CPP

 

Hypothèses de la CPP Entraves aux hypothèses

(situation « non concurrentielles »)

Atomicité des offreurs et des demandeurs Concentration des offreurs et des demandeurs
Transparence du marché Information partielle, confidentielle, fallacieuse
Homogénéité des produits Différentiation des produits par les offreurs
Liberté d’entrée sur le marché Existence des barrières à l’entrée
Mobilité parfaite des facteurs de productions Barrières protectionnistes

 

  1. Le critère d’atomicité du marché et la typologie de Stackelberg

Le critère d’atomicité postulé par le marché de CPP est remis en cause non seulement au niveau de l’offre mais également au niveau de la demande. Le non-respect du critère d’atomicité est à la base de l’existence des marchés dits de concurrence imparfaite. L’économiste allemand Stackelberg a résumé dans un tableau les différentes configurations envisageables.

Acheteurs Vendeurs Types de marché
Très nombreux Très nombreux Concurrence
Très nombreux Peu nombreux Oligopole
Très nombreux Deux Duopole
Très nombreux Un Monopole
Un seul Un Monopole bilatéral
Un seul Très nombreux Monopsone
Deux Très nombreux Duopsone
Peu nombreux Très nombreux Oligopsone

 

  1. La formation des prix en concurrence imparfaite

La fixation de prix en concurrence imparfaite s’opère de façon sensiblement différente suivant la configuration du marché envisagée.  Il existe donc une possibilité d’action de la part des agents économiques notamment les producteurs. Ceux-ci ne sont plus des « Price Taker » c’est-à-dire soumis passivement au marché. Ils sont désormais des « Price Maker ».

En situation de monopole, l’entreprise fixe elle-même le prix du marché de manière à maximiser son profit. Ce dernier est soumis à deux effets contraires : un effet prix (la hausse des prix permet d’augmenter les recettes) et un effet quantité (la hausse des prix va diminuer la quantité demandée). La concurrence monopolistique et les situations d’oligopole sont le plus souvent la règle dans la réalité. Sur le marché d’oligopole, une lutte des prix des entreprises peut conduire à la disparition de certaines entreprises. En effet, lorsque le produit est strictement homogène, les consommateurs choisissent le prix le moins cher. Pour éviter un affrontement par les prix, les entreprises peuvent adopter une stratégie de différenciation du produit qui leur permet de fidéliser une clientèle. Le produit est alors unique pour les demandeurs ; l’entreprise se trouve en situation de concurrence monopolistique ou d’oligopole différencié.

De manière générale, l’entreprise tient compte, dans la fixation des prix, de ses coûts de production et du prix psychologique accepté par les consommateurs après étude du marché. Elle doit aussi tenir compte de la sensibilité de la demande à la modification du prix du bien appelé élasticité de la demande.

CHAPITRE 3 : LA CROISSANCE ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

La croissance économique est un objet d’étude essentiel des sciences économiques. C’est un objectif fondamental de l’ensemble des pouvoirs publics qui s’intéressent à l’augmentation quantitative de la production. Lorsqu’on intègre les aspects qualitatifs, on définit le concept de développement économique.

1. La croissance économique

A°- La définition

La croissance économique est une mesure purement quantitative qui reflète l’augmentation de la production à long terme dans une économie. La croissance économique est donc l’augmentation soutenue de la production d’un pays sur une longue période. La croissance économique se distingue de l’expansion économique. L’expansion économique est une augmentation conjoncturelle de la production d’un pays. En d’autres termes, elle correspond à une phase ascendante du cycle économique et est de durée courte ou moyenne.

La croissance économique suppose que soient réunies :

  • des conditions économiques : émergence de l’industrie, système de financement efficace, main d’œuvre suffisante et de qualité ;
  • des conditions institutionnelles et culturelles : existence d’un droit des contrats, stabilité politique, attitudes favorables au progrès technologiques.

B°- La mesure de la croissance économique

La mesure de la croissance économique repose essentiellement sur le calcul du PIB. Le calcul du PIB se fait essentiellement à travers trois optiques : optique production, optique demande et optique revenu. Pour établir le taux de croissance, on calcule le taux de variation du PIB sur une période donnée.

C°- Les facteurs explicatifs de la croissance économique

Les économistes ont d’abord cherché à expliquer la croissance économique en prenant en compte la contribution de deux grands facteurs de production que sont le travail et le capital. Une distinction est faite entre la croissance intensive et la croissance extensive. On parle de croissance extensive lorsque l’augmentation de la production résulte de l’accroissement des facteurs de production utilisés. La croissance intensive quant à elle renvoie à la croissance qui provient d’une meilleure utilisation des facteurs de production génératrice de gain de productivité.

La contribution des facteurs de production a fourni une explication insuffisante de la croissance ; les économistes ont donc cherché l’origine de la grande partie inexpliquée. En premier lieu, le progrès technique, considéré comme exogène, a été le facteur identifié notamment par Solow (1957). Dans les années 1980, une théorie de la croissance dite endogène a été développée pour identifier les facteurs explicatifs de la croissance. Selon la théorie de la croissance endogène, la croissance économique résulte en grande partie du progrès technique qui dépend lui-même des différents facteurs internes à la croissance économique notamment l’accumulation du capital (Romer, 1986), les innovations technologiques (Romer, 1990), le capital humain (Lucas, 1988), les infrastructures publiques (Barro, 1990).

§ L’accumulation du capital

Lorsqu’une entreprise accumule du capital, elle accumule également des connaissances grâce à la pratique (effet de learning spillover ou effet d’apprentissage). Les autres entreprises en profitent grâce à la circulation de l’information.

§ Les innovations technologiques

Les innovations technologiques profitent à la collectivité grâce aux brevets (l’acquisition d’un brevet est moins onéreuse que la recherche). Elles trouvent aussi des applications dans d’autres activités ; ce qui engendre de nouveaux marchés.

§ Le capital humain

Un individu qualifié sera d’autant plus efficace qu’il opère dans un environnement composé d’individus qualifiés. En effet, il faut alors tenir compte de la circulation de l’information. Celle-ci est mieux comprise et mieux transmise au fur et à mesure que le capital moyen s’élève.

§ Les infrastructures publiques

Les infrastructures publiques permettent d’accroître l’efficacité productive en procurant une maind’œuvre qualifiée (dépenses de formation), en améliorant les conditions de transport, de communication, etc.

2. Les irrégularités de la croissance : les cycles

La croissance économique présente une tendance générale et durable d’accroissement des grandeurs économiques (le trend) mais également des variations significatives au cours du temps appelées fluctuations ou cycles. Le trend (de la croissance) désigne le mouvement séculaire d’accroissement de la richesse produite par l’homme. Un cycle est un phénomène de fluctuation économique ayant un caractère régulier et se traduisant par l’alternance de phases d’expansion et de récession affectant des grandeurs économiques fondamentales (production, prix, emploi). On distingue plusieurs types de cycles à l’amplitude plus ou moins importante. Il y a d’abord les cycles longs dits « cycles de Kondratieff » qui présentent une forte amplitude (durée totale de 50 ans environs) avec deux phases d’environ 25 ans, l’une d’expansion et l’autre de récession. Il y a ensuite des cycles courts appelés respectivement « cycles de Juglar » (d’une périodicité comprise entre 5 et 10 ans) et « cycles de Kitchin » (d’une amplitude totale de 3 à 4 ans).

3. Le développement économique

Le développement économique est un phénomène qualitatif, irréversible et observable sur une longue période, caractérisée par une transformation des structures économiques et sociales liées à la croissance économique. Ces changements de structure renvoient à des différentes manifestations du développement : niveau de vie, industrialisation, indicateurs démographiques, urbanisation, niveau d’éducation et de qualification. La notion de développement peut s’apparenter à une augmentation du bien-être. Dans ce cas, on parle de développement humain. Le développement humain est caractérisé par la capacité d’un pays à satisfaire les besoins d’une population non seulement en termes monétaires mais également en termes non-monétaires notamment l’éducation, la santé, l’hygiène etc.  Dans cette perspective, les économistes de Nations-Unies calculent un « indicateur de développement humain » (IDH) en combinant plusieurs facteurs élémentaires : le PIB par habitant mais aussi l’espérance de vie, le taux d’alphabétisation des adultes, le taux de scolarisation. De nos jours, les problèmes environnementaux occupent une place très importante d’où le recours au concept de développement durable qui rend compte de l’impératif d’équilibre de la croissance au plan écologique. Le développement durable est le développement qui répond aux besoins présents sans compromettre les besoins des générations futures.

Conclusion

La croissance économique revêt un enjeu pour les économies ; c’est une mesure quantitative de la production d’un pays au cours d’une période. Plusieurs explications sont fournies à ce phénomène qui peut connaître des fluctuations ou cycles. Si l’on s’intéresse à l’aspect qualitatif, on met en exergue le concept de développement économique.

CHAPITRE 4 : LA MONNAIE

Lorsqu’on parle de l’économie, on pense très rapidement à la monnaie. Cette dernière est souvent assimilée à la richesse. Ce lien est-il justifié ? La monnaie n’est-elle pas plutôt la représentation de la richesse sans être véritablement son fondement ?

1. La monnaie et ses spécificités

A°- Les fonctions de la monnaie

La monnaie remplit trois fonctions bien distinctes à savoir :

  • Une unité de compte (fonction d’évaluation) : cette fonction a pour but d’évaluer tous les biens et est ainsi la fonction centrale de la monnaie car elle permet l’existence d’une économie d’échange.
  • Une réserve de valeur (fonction de thésaurisation) : la monnaie permet d’étaler les achats dans le temps ; elle représente un lien entre le présent et le futur : c’est un instrument d’épargne.
  • Un intermédiaire des échanges (fonction de circulation) : elle permet aux biens de s’échanger facilement en établissant un lien entre les échangistes potentiels qui sans elle ne pourrait réaliser leur transaction.

B°- Les formes de monnaie et les différents moyens de paiement a°- Les formes de la monnaie

Il existe plusieurs formes de monnaie.

§La monnaie marchandise

Au départ, la seule forme d’échange était le troc. Mais du fait des difficultés inhérentes à une économie de troc, il a fallu choisir un bien qui devrait jouer le rôle de monnaie. Ainsi, la monnaie, sous son aspect primitif, a pris la forme d’une marchandise.

§ La monnaie métallique

Succédant aux monnaies-marchandises, les premières pièces de monnaie font leur apparition dans l’Antiquité et jouent un rôle dominant jusqu’au XIXe siècle. Ont ainsi cohabité pendant des siècles des pièces de cuivre, de bronze, d’argent et d’or. Ces métaux ont été choisis en fonction de leur rareté, mais aussi en raison d’une symbolique religieuse (or,soleil, argent,lune).

§ La monnaie fiduciaire

Il s’agit des billets en circulation qui sont initialement émis par des banquiers privés dès le XVIIe siècle. Mais des faillites retentissantes, comme celle de la Banque générale de John Law en 1720, ont justifié la nécessité de limiter la création de monnaie fiduciaire. Dès lors, celle-ci a été dans un premier temps dépendante de la quantité d’or que possédait la Banque centrale (principe de la currency school), puis s’en est affranchit (principe de la banking school). Les billets deviennent alors une véritable monnaie émise en contrepartie de crédits à l’économie. De nos jours, la valeur des billets de banque ne repose plus que sur la confiance qu’ont les agents économiques dans leur monnaie (fidus signifie confiance en latin), confiance obligée, car non seulement les billets ont un cours légal (nul ne peut les refuser en paiement d’une dette), mais ils ont également un cours forcé, c’est-à-dire qu’ils sont inconvertibles en métal précieux.

§ La monnaie scripturale  

C’est la monnaie qui consiste à un simple jeu d’écriture dans un compte. On parle de compte à vue car l’avoir est remboursable en billets au guichet (à vue signifie au titulaire lui-même). Elle ne circule pas de main à main mais par jeu d’écriture (scriptural) d’un compte à un autre au sein du système bancaire.

  • La monnaie électronique

La monnaie électronique consiste en un encours stocké dans une carte prépayée multi prestataire.

b°- Les moyens de paiement

Les moyens de paiement servent à la circulation des instruments monétaires sont :

  • La monnaie métallique ou monnaie divisionnaire
  • La monnaie fiduciaire
  • Chèque
  • Virement bancaire
  • Carte de paiement

C°- La masse monétaire et ses contreparties

La masse monétaire se définit comme l’ensemble des moyens de paiement en circulation dans une économie et des placements facilement transformables en liquidité. En d’autres termes, la masse monétaire peut être définie comme l’ensemble des actifs monétaires détenus par les agents économiques non financiers et qui peuvent être immédiatement ou rapidement utilisés pour réaliser les grandes fonctions macroéconomiques : consommation, investissement, épargne.

La masse monétaire peut être divisée en différents agrégats monétaires. Un agrégat monétaire est défini comme le regroupement d’un ensemble homogène d’actifs monétaires et non monétaires. Il est alors possible de classer les agrégats de monnaie par ordre de liquidité décroissante. L’on peut ainsi avoir la classification suivante notamment dans la BEAC :

  • L’agrégat monétaire M1 qui est composé de la monnaie fiduciaire (Billets et pièces) et des dépôts à vue. M1= Pièces + Billets + dépôts à vue.
  • L’agrégat monétaire M2 est constitué des actifs monétaires compris dans M1 et de la quasimonnaie (dépôts d’épargne et dépôts à terme). M2 = M1 + dépôts d’épargne et dépôts à terme.

Les contreparties de la masse monétaire renvoient aux sources de création monétaire par le système financier. On distingue les créances sur l’étranger, les créances nettes sur l’Etat et les crédits à l’économie qui sont la composante la plus importante.

2. Les débats autour du rôle de la monnaie et la demande de monnaie

Quelles sont les conséquences de la variation de la masse monétaire sur les phénomènes économiques réels ? Qu’est-ce qui motivent les agents économiques à détenir leur richesse sous formes liquides ?

Pour certains auteurs (les classiques et les néoclassiques), les phénomènes monétaires et les phénomènes réels sont déconnectés : on parle de la neutralité de la monnaie. En effet, la neutralité de la monnaie signifie que la monnaie n’a aucune influence sur les grandeurs réelles de l’économie (croissance économique, investissement, consommation etc.) notamment à long terme. Par ailleurs, la monnaie est uniquement demandée par les agents pour effectuer les transactions. Dans cet ordre d’idées, la demande de monnaie est fonction positive du revenu.

A contrario, d’autres auteurs (les keynésiens) remettent en cause la séparation entre la sphère réelle et la sphère monétaire. Pour ces auteurs, la monnaie est non neutre c’est-à-dire qu’elle influence les grandeurs réelles de l’économie. Les Keynésiens distinguent trois motifs de détention de la monnaie. Le premier est le motif de transaction : les agents désirent les encaisses afin de pouvoir réaliser les transactions. Cette demande est fonction positive du revenu. Le second motif est celui de précaution : les agents économiques désirent détenir la monnaie pour faire face aux dépenses imprévues et cette demande est fonction positive du revenu. Le troisième motif est celui de spéculation. Le motif de spéculation est déterminé par l’objectif de réalisation des plus-values en capital sur le marché des titres. Ce motif est fonction négative du taux d’intérêt.

3. L’offre de monnaie

3.1. Le mécanisme de la création monétaire

L’offre de monnaie ou la création monétaire signifie la mise en circulation d’une nouvelle quantité de monnaie et non la substitution d’une forme de monnaie à une autre. En effet, elle consiste en la mise en disposition des agents économiques de moyens de paiement totalement nouveaux. En général, seuls les agents financiers, habilités à gérer les moyens de paiements scripturaux, peuvent réaliser cette opération. Il leur suffit d’inscrire une somme sur le compte d’un agent non financier pour créer une monnaie scripturale supplémentaire. Cette inscription se fait en contrepartie d’une créance, c’est-à-dire en échange d’une promesse de remboursement ultérieur.

3.2. Les acteurs de la création monétaire

La création monétaire est l’œuvre des banques commerciales, la Banque Centrale et le Trésor Public. Les banques commerciales créent de la monnaie scripturale : lorsqu’une banque accorde le crédit à un client et verse la somme sur son compte, elle augmente à la fois l’actif (créance sur le client) et le passif (compte du client) de son bilan. Elle crée de la monnaie ex-nihilo. En revanche, on ne peut pas parler de création monétaire lorsque l’institution financière prête des ressources qu’elle a collectées auparavant. La création monétaire des banques est la plus importante. La Banque Centrale, ne crée paradoxalement qu’assez peu de monnaie. Disposant du monopole de l’émission des billets, elle les met à la disposition des banques commerciales contre de la monnaie centrale (compte courant des banques) en fonction des besoins de leurs clients. La création monétaire par le Trésor Public est infime. En gérant le circuit des comptes chèques postaux, le Trésor Public est amené à régler certaines dépenses de l’Etat par inscription sur ces comptes et à créer ainsi de la monnaie scripturale.

4. Financement de l’économie

Parmi les agents économiques (ménages, entreprises, administrations publiques), certains ont des fonds excédentaires par rapport aux projets qu’ils souhaitent réaliser. On dit qu’ils ont une capacité de financement. D’autres agents, au contraire, n’ont pas assez de fonds pour financer leurs projets. On dit qu’ils ont un besoin de financement. En pratique, les agents à capacité de financement sont les ménages et ceux à besoins de financement sont les entreprises.

Pour se financer, les agents à besoin de financement ont deux possibilités. Ils peuvent aller voir directement les agents à capacité de financement et leur demander des fonds : c’est la finance directe. La finance directe a lieu sur le marché. Ils peuvent également passer par un intermédiaire, le plus souvent une banque : c’est la finance indirecte ou finance intermédiée. Lorsque le mode de financement directe prédomine dans l’économie, on dit qu’on est dans une économie de marché. Lorsque la finance intermédiée prend une place prépondérante dans le financement de l’économie, on dit que l’économie est une économie d’endettement..

Conclusion

La monnaie est au centre de la vie économique de toute nation ; au-delà des fonctions qu’elle remplit, le rôle de la monnaie dans l’activité économique fait l’objet d’incessants débats.

CHAPITRE 5 : LES DESEQUILIBRES ECONOMIQUES 

La croissance économique est soumise à des fluctuations et des cycles. Certains déséquilibres économiques et monétaires peuvent être persistants. L’inflation et le chômage constituent les principaux maux des pays.

1. Le chômage

Le chômage est une situation de déséquilibre sur le marché du travail. Le travail représente l’ensemble des capacités physiques et intellectuelles que les hommes mettent en œuvre pour produire les biens et services nécessaires à la satisfaction de leurs besoins.

A°- Le marché du travail

Le marché du travail est défini comme le lieu de rencontre entre l’offre de travail et la demande de travail. L’offre de travail émane des ménages et dépend de la population active et de la durée du travail. La population active est l’ensemble des personnes qui exercent un emploi ainsi que celles n’ayant pas d’emploi, désireuses d’en occuper un et menant une recherche active pour cela. La population active comprend donc les actifs occupés et les chômeurs. La durée de travail est le temps qu’accomplit un salarié dans le cadre de la production des biens et services. On distingue la durée légale du travail définie par les textes de la loi et la durée effective du travail qui tient compte de l’absentéisme, du chômage technique et des heures complémentaires. L’offre de travail dépend aussi de la qualité du facteur travail que les économistes mesurent par la productivité du travail. La productivité du travail est le rapport entre un volume de production réalisé et le volume de travail nécessaire à cette production. La demande de travail est exprimée par les entreprises.

B°- La définition du chômage

Selon le BIT (Bureau International du Travail), pour être considéré comme chômeur, trois conditions sont nécessaires :

  • Etre sans travail, c’est-à-dire n’avoir pas travaillé ne serait-ce qu’une heure au cours de la semaine de référence ;
  • Etre disponible pour travailler dans un emploi salarié ou non ;
  • Etre à la recherche d’un travail.

 

Le chômage est donc la situation des personnes qui sont sans emploi, à la recherche d’un emploi, et disponible pour occuper un emploi.

B°- Les conceptions théoriques du chômage a°- Le chômage classique ou chômage volontaire

Pour l’analyse classique et néoclassique et du fait de la flexibilité des prix, le chômage est lié à la volonté délibérée des agents économiques de ne pas travailler soit parce qu’il trouve la rémunération insuffisante, soit parce qu’ils sont à la recherche d’un travail mieux rémunéré. La conception classique du chômage conduit à des conséquences en matière d’emploi. En effet, la flexibilité du salaire réel permet de réguler les déséquilibres sur le marché du travail. Les interventions publiques sont, dans cette optique, sources de rigidités et donc de chômage. Le salaire minimum, les allocations de chômage et le contrôle des licenciements conduisent à un salaire réel supérieur au salaire d’équilibre. La lutte contre le chômage passe par la restauration des mécanismes concurrentiels des marchés.

b°- Le chômage keynésien ou chômage involontaire

Dans l’analyse keynésienne, une économie peut être durablement en situation de sous-emploi si la demande globale est inférieure à l’offre globale. Dans ce cas, les entreprises sont désireuses de produire plus, mais ne le font pas à cause d’une insuffisance de la demande. L’équilibre ainsi réalisé est régressif et contribue à créer du chômage (on parle de chômage involontaire). C’est donc un chômage qui émane du ralentissement de l’activité économique.

C°- Les différents types de chômage

§ Le chômage frictionnel

Le chômage frictionnel est un chômage de courte durée qui correspond au temps nécessaire pour passer d’un emploi à un autre.

  • Le chômage conjoncturel

Le chômage conjoncturel est lié au ralentissement de l’activité économique.

§ Le chômage structurel

Le chômage structurel est lié aux modifications des structures de l’économie telles que le déclin des activités traditionnelles, l’internationalisation des économies, la tertiarisation des activités etc.

§ Le chômage partiel

Le chômage partiel correspond à une réduction forcée du temps du travail décidé par l’entreprise pour un temps limité notamment en cas de réduction passagère de l’activité.

§ Le chômage technique

Le chômage technique concerne un arrêt partiel ou total du travail qui résulte des causes externes à l’entreprise.

2. L’inflation

A°- La définition 

L’inflation peut être définie comme une hausse soutenue et durable du niveau général des prix. Elle exclut les hausses localisées et passagères ; elle suppose que l’augmentation des prix se transmette à toute l’économie et se reproduise à la période suivante. La désinflation est la baisse du taux d’inflation. La déflation se définit comme une baisse du niveau général des prix. Elle est généralement associée à une récession c’est-à-dire une diminution du PIB (croissance négative). L’hyperinflation est définie par un taux d’inflation d’au moins 50% par mois. La stagflation désigne une période au cours de laquelle on observe de manière concomitante une inflation élevée et un chômage élevé.

B°- Les sources de l’inflation

On distingue au moins quatre sources de l’inflation : l’inflation monétaire, l’inflation par la demande, l’inflation par les coûts et l’inflation importée.

§ L’inflation monétaire

L’inflation monétaire découle d’un excès de création monétaire c’est-à-dire la mise en circulation d’une quantité importante de monnaie. C’est l’explication dominante de l’inflation qui repose sur l’analyse des économistes monétaristes.

§ L’inflation par les coûts

Les coûts de production augmentent si les prix des facteurs croissent plus vite que leur productivité. Si les coûts s’élèvent, les entreprises sont incitées à augmenter leurs prix. Leurs clients accroîtront à leur tour leurs prix s’il s’agit d’entreprises ou réclameront des hausses de salaires si ce sont des ménages. De proche en proche, un processus inflationniste en boucle risque de s’installer.

§ L’inflation par la demande

Pour les keynésiens, la création monétaire n’est inflationniste que si elle alimente la demande et que, par ailleurs l’appareil de production ne peut y répondre. L’inflation ne peut apparaître que quand la demande augmente alors qu’on se trouve près du plein emploi. Ainsi, les entreprises ne sont pas à mesure de répondre à la hausse de la demande.

§ L’inflation importée

La hausse des prix des produits importés a un effet direct sur l’indice des prix. Elle enregistre un processus inflationniste car elle incite les salariés à réclamer des hausses de salaire les entreprises à augmenter leurs prix.

C°- Les conséquences de l’inflation

Le débat sur les conséquences de l’inflation est complexe. Tous les économistes s’entendent pour voir dans l’hyperinflation un mal absolu. Les débats sont plus vifs en revanche dès lors que les taux d’inflation restent raisonnables. Pour certains, l’inflation est nécessaire car elle serait un « lubrifiant » indispensable au bon fonctionnement de l’économie alors que, selon d’autres, combattre les tensions inflationnistes est une priorité pour les politiques économiques.

a°- L’inflation favorise les agents endettés

La charge de remboursement d’un emprunt à taux fixe devient moins lourde dans un contexte de hausse des prix et des revenus. L’inflation favorise donc les agents structurellement endettés comme l’Etat et les entreprises. Pour ces dernières, l’inflation améliore « toutes choses étant égales par ailleurs », la rentabilité de l’investissement productif. L’Etat peut aussi facilement réduire sa dette et retrouver des marges de manœuvre budgétaires. L’inflation peut aussi favoriser le crédit à la consommation et donc la consommation. Ces effets positifs pour la croissance économique peuvent toutefois être contrebalancés par des évolutions favorables. Les épargnants et les créanciers sont lésés. Ils risquent de réclamer une hausse des taux d’intérêt pour se couvrir contre le risque d’inflation. Une inflation durable peut donc pénaliser les futurs emprunteurs. Les conséquences sur le niveau d’épargne sont ambigües. Les agents peuvent considérer que l’inflation réduit la valeur de leur patrimoine et désirer le reconstituer (ils diminuent leur consommation et accroissent l’épargne). Ils peuvent estimer au contraire que l’effort d’épargne est mal rémunéré et augmenter successivement leur consommation ; ce qui attise les tensions inflationnistes. L’insuffisance d’épargne risque alors de pénaliser l’investissement futur.

b°- L’inflation entraîne des modifications dans la répartition des revenus

Tous les prix et revenus n’évoluent pas de même manière identique, de sorte que les prix relatifs sont modifiés. Certains y gagnent et d’autres y perdent. Les agents pénalisés sont tout d’abord les titulaires de revenus fixes ou imparfaitement indexés sur l’inflation (les retraités par exemple). C’est aussi le cas des agents fortement exposés à la concurrence internationale, qui peuvent difficilement obtenir des hausses de salaires leur garantissant le maintien du pouvoir d’achat. Les gagnants opèrent le plus souvent dans les secteurs abrités de la concurrence internationale, où les contraintes de coûts sont plus faibles et les hausses de salaires plus supportables. Les salariés les plus qualifiés sont également plus préservés que les autres. L’inflation favorise donc, dans certains contextes, l’accroissement des inégalités.

c°- L’inflation, source d’incertitude, fausse allocation des ressources 

En économie de marché, les prix relatifs doivent refléter les raretés relatives afin d’orienter les agents économiques dans l’allocation de leurs ressources. L’inflation bouleverse les prix de telle sorte qu’ils ne reflètent plus les fondamentaux de l’économie. Les entreprises ne sont plus à même d’anticiper correctement l’évolution de leurs coûts et de leurs recettes. De même les consommateurs ne peuvent plus faire des prévisions sur leurs dépenses.

d°- L’inflation et les déséquilibres extérieurs

Lorsqu’un pays à un taux d’inflation supérieur à celui de ses principaux partenaires économiques, la compétitivité-prix de ses produits recule. Cela conduit plus ou moins à une dégradation du solde des échanges extérieurs. Cette évolution peut exercer un effet défavorable sur la croissance économique et l’emploi dans une économie fortement ouverte sur l’extérieur.

D°- Les instruments de lutte contre l’inflation

Les pouvoirs publics disposent de plusieurs instruments de lutte contre l’inflation à savoir les politiques monétaires restrictives, les politiques budgétaires et fiscales, le contrôle des prix, la politique des revenus, la politique de la concurrence.

a°- Les politiques monétaires restrictives

La lutte contre l’inflation passe par un ralentissement de la croissance de la masse monétaire. Initialement, la Banque Centrale fixait un taux de croissance de la masse monétaire et donc des crédits. Cette politique s’est révélée inefficace du fait de sa rigidité car limitant la concurrence entre les établissements de crédits. La politique monétaire s’est donc orientée sur la politique des taux d’intérêt directeurs : la hausse des taux d’intérêt directeurs aboutit in fine à une diminution de crédits et donc de la masse monétaire. Pour être efficace, la politique monétaire doit être crédible auprès des agents. Ils doivent considérer que les autorités monétaires ne changeront pas d’objectif en cours de route. C’est pourquoi les Etats ont rendu les Banques Centrales indépendantes du pouvoir politique.

b°- Les politiques budgétaires et fiscales

La réduction du déficit budgétaire, qui peut se traduire par la baisse des dépenses publiques et la hausse des impôts, permet d’agir directement sur le niveau de la demande globale. Le recours à l’emprunt sur les marchés financiers plutôt que le financement monétaire pour couvrir le déficit permet également de résorber les tensions inflationnistes.

c°- Le contrôle des prix

Cet instrument permet de stopper momentanément l’augmentation des prix. Cependant, il agit sur les symptômes et pas sur les causes. La sortie du blocage des prix peut être l’occasion des phénomènes de redémarrage de l’inflation.

d°- La politique des revenus

Cette politique vise à fixer les normes de progression des revenus compatibles avec la stabilité des prix.

e°- La politique de la concurrence

La politique de la concurrence vise à lutter contre les entraves à la concurrence en vue de limiter les marges de manœuvre en matière des prix. Elle repose sur le démantèlement des monopoles, notamment dans les services publics en réseaux (téléphonie, électricité, gaz, transports.

CHAPITRE 6 : L’ETAT

L’État désigne la personne morale de droit public qui, sur le plan juridique, représente une collectivité, un peuple ou une nation, à l’intérieur ou à l’extérieur d’un territoire déterminé sur lequel elle exerce le pouvoir suprême, la souveraineté.

Au regard de la Comptabilité nationale, l’Etat renvoie au secteur institutionnel des administrations publiques (APU) dont la fonction principale consiste « à produire des biens et services non marchands ou à effectuer des opérations de redistribution du revenu ou du patrimoine national »

De façon générale, l’Etat peut être analysé de deux façons. La première consiste à considérer que c’est un organisme bienveillant qui cherche à maximiser le bien-être de tous, tout en permettant la réduction des inégalités. Dans ce cas, on peut chercher à mesurer ses performances ou à expliquer ce qu’il faudrait faire pour les améliorer. La deuxième façon d’analyser l’Etat est d’essayer de comprendre son fonctionnement, et de comprendre comment les décisions sont prises en mettant en évidence les rapports de pouvoir, les préoccupations économiques, et les conflits d’intérêts.

1. L’évolution du rôle de l’Etat

Si l’opposition entre Etat gendarme et Etat providence reflète une partie des débats du 19ème et du 20ème siècle, il convient de rappeler que l’autorité publique n’a jamais cessé d’intervenir dans la sphère économique et sociale. Les guerres de 1914 et de 1940, la crise économique de1929 ainsi que les récentes crises financières vont donner une nouvelle légitimité aux interventions de l’Etat.

A°- De l’Etat gendarme à l’Etat Providence

Les théoriciens libéraux affirment qu’en économie de marché, l’Etat doit se contenter d’assurer ses missions régaliennes : c’est ce qu’on a appelé l’Etat gendarme. Mais dans la première moitié du XXème siècle, l’intervention économique et sociale s’est développée : l’Etat gendarme fait place à l’Etat providence.

a°- L’Etat gendarme

Pendant très longtemps, l’Etat a eu pour fonction principale d’assurer le maintien de l’ordre dans la nation, et tout particulièrement de veiller au respect des droits de propriété privée. Cette fonction revenait à doter la puissance publique de moyens lui permettant d’avoir une police, une justice et une défense nationale. Il en résultait que le budget de l’Etat était composé de dépenses liées à ces fonctions et des recettes, principalement procurées par l’impôt, destinées à les financer. Ce phénomène procédait très largement de la conception libérale du rôle de l’Etat, qui en théorie, n’avait pas de volonté propre. La satisfaction des besoins individuels passant normalement par les mécanismes du marché. L’Etat devait contenter de garantir les règles du jeu du marché et, dans le cas contraire, disposer des moyens de sanctionner ceux qui y contreviendraient. En d’autres termes, il devait se limiter à un rôle d’Etat-Gendarme ou encore d’Etat minimal.

b°- L’Etat providence

L’expression Etat providence attribue à l’Etat le devoir de jouer un rôle actif en stimulant la croissance économique, en fournissant une protection sociale et en corrigeant les injustices sociales. Le terme Etat Providence renvoie à plusieurs interprétations. C’est tout d’abord un terme qui traduit une opposition entre deux courants de pensée du 19ème siècle. D’un côté, les libéraux qui affirment le primat de l’individu et le risque de voir l’Etat se substituer à la Providence. De l’autre, des républicains du second empire qui critiquent la philosophie trop individualiste de certaines lois et préconisaient un « Etat social » se préoccupant de l’intérêt général.

B°- Les fonctions de l’Etat de Richard Musgrave (1959)

Musgrave considère que l’action des pouvoirs publics peut être appréhendée à travers trois fonctions principales : une fonction d’allocation, de redistribution et de stabilisation (ou de régulation).

a°- La fonction d’allocation des ressources

L’Etat est amené à intervenir pour cinq raisons principales :

  • La définition de règles et des droits permettant le fonctionnement des marchés ;
  • L’existence de rendements croissants aboutissant à l’émergence de monopoles naturels ;
  • La production des biens et services collectifs devant l’incapacité du marché à le faire de manière optimale ;
  • La multiplication des effets externes liés aux activités des particuliers (ménages, entreprises).
  • La régulation du marché des biens tutélaires. Il s’agit de biens que le marché produit spontanément en quantité suffisante pour satisfaire les besoins des agents, mais pour lesquels l’autorité publique considère qu’il faut intervenir dans la consommation des agents, pour qu’ils consomment plus (l’hygiène) ou moins (alcool).

b°- La fonction de redistribution 

Elle relève de la justice sociale. Par nature, le libéralisme et l’économie de marché créent des inégalités dans la société. L’Etat est amené à réduire ces inégalités en redistribuant une partie de la richesse nationale créée.

c°- La fonction de stabilisation 

Cette fonction vise les grands objectifs macroéconomiques tels qu’un niveau d’emploi élevé, une inflation modérée, une croissance du PIB… Cette fonction relativement nouvelle de l’Etat nécessite des moyens appropriés que sont la politique budgétaire et la politique monétaire.

 

2. L’intervention de l’Etat par le jeu des politiques économiques

Toute politique économique consiste à poursuivre un certain nombre d’objectifs à partir d’instruments spécifiques.

A°- Le concept de politique économique

La politique économique est définie comme l’ensemble des décisions prises par les autorités gouvernementales dans le but de réguler l’activité économique. Cette définition montre que la politique économique se place dans un cadre interventionniste contraire au « laisser faire les hommes, laisser passer les marchandises » de Vincent de Gournay.

Quatre finalités, connues sous le nom de carré magique de Kaldor (1957), constituent l’objectif de toute politique économique à savoir :

  • La croissance économique
  • Le plein emploi
  • La stabilité des prix
  • L’équilibre extérieur

B°- Politique conjoncturelle- politique structurelle

Une distinction est faite entre politique conjoncturelle et politique structurelle. La politique conjoncturelle vise à maintenir ou rétablir les grands équilibres économiques et financiers à court terme. Une politique structurelle a pour but de modifier les structures de l’économie à long terme.

Le tableau suivant compare les politiques conjoncturelles et structurelles

Politique conjoncturelle Politique structurelle
Durée Court terme Long terme
Objectif Maintien des équilibres Adaptation des structures
Effets Quantitatifs Qualitatifs

 

C°- Les instruments traditionnels de la politique économique

Les deux instruments de la politique économique notamment conjoncturelle sont : la politique monétaire et de la politique budgétaire. La politique monétaire est définie comme l’ensemble des décisions prises par les autorités monétaires pour réguler la quantité de monnaie en circulation.  Elle vise la stabilité interne de la monnaie par une régulation de la masse monétaire. En la matière, la politique monétaire oscille entre le « ni trop » et le « ni trop peu ». En effet, la quantité de monnaie ne doit être ni trop importante pour éviter les phénomènes inflationnistes, et en quantité suffisante pour que les transactions entre les agents économiques puissent s’opérer.

La politique budgétaire s’appuie sur l’élaboration du budget de l’Etat, qui n’est autre que la prévision de l’ensemble des recettes et dépenses de l’Etat pour l’année. Le solde budgétaire constitue un instrument de politique économique en ce sens qu’il agit sur l’activité économique. En effet, dans une perspective keynésienne, un déficit budgétaire peut permettre de relancer l’activité économique grâce au supplément de revenu distribué aux agents économiques. La croissance des revenus qui en résulte va permettre en retour, d’augmenter les recettes fiscales et de diminuer le déficit budgétaire.

La difficulté posée par le déficit budgétaire est celui de son financement. En général, on distingue trois principales sources de financement à savoir :

  • Le financement par l’endettement
  • Le financement par les impôts
  • Le financement par la création monétaire

3. L’intervention de l’Etat dans la résolution des défaillances des marchés.

En économie de marché, les prix jouent un rôle central comme moyen à la fois d’information, d’incitation et d’allocation. D’abord, ils constituent un moyen d’information pour les agents qui sont informés du caractère rare des différents biens. Ensuite, les prix jouent un rôle d’incitation dans la mesure où toute variation de prix va en effet conduire les consommateurs et les producteurs à modifier leur offre ou leur demande. Enfin, les prix assurent l’équilibrage des marchés et le bon déroulement des transactions.

Or, il existe « des marchés sans prix » ; dans ce cas, on parle de des défaillances des marchés. Il y a défaillance de marché lorsque le marché s’avère incapable de fixer les prix et d’assurer une affectation optimale des ressources. Deux cas sont particulièrement connus : les externalités et les biens collectifs.

A°- Les externalités

Les externalités existent dès lors qu’interviennent des interactions entre agents économiques induisant des avantages ou des inconvénients non pris en compte par le marché et donc par le système des prix. Il existe deux types d’externalités à savoir les externalités positives et les externalités négatives qui traduisent respectivement une amélioration ou une dégradation de la situation des agents économiques.

Comme externalités positives, l’on peut citer l’amélioration du système routier, l’amélioration de la formation des individus et ses retombés pour les entreprises qui n’ont pas pour autant financé ces activités de façon spécifique. Les situations d’externalités négatives sont diverses et l’on peut citer le phénomène de pollution que les mécanismes de marché sont impuissants à faire cesser.

Dans les différents cas de figure, l’Etat est amené à intervenir pour pallier à ces défaillances de marché en favorisant une internalisation de ces externalités. Dans le cas des externalités négatives, l’Etat peut imposer une taxe par exemple au pollueur pour inciter les agents à réduire les externalités négatives. S’agissant des externalités positives, l’Etat intervient par le biais des subventions accordés. Certains économistes néoclassiques sont hostiles à l’intervention de l’Etat et préconisent plutôt la distribution des droits des propriétés.

B°- Les biens collectifs     

Un bien collectif est un bien qui respecte les conditions de non exclusion et de non rivalité. La notion de non-exclusion est souvent définie comme le fait qu’il est impossible ou techniquement très coûteux d’interdire l’accès de ce bien ou service à ceux qui souhaitent en profiter (routes ; éclairage public etc.). La notion de non-rivalité est associée au fait que la consommation du bien public par un agent n’empêche pas la consommation de ce même bien par d’autres agents. On dit que le bien est « indivisible » ou qu’il n’est pas détruit par la consommation. Les biens ayant cette double caractéristique sont plus souvent pris en charge par l’Etat car il est difficile sinon impossible de demander un prix à un consommateur donné pour en bénéficier ; ce qui par voie de conséquence dissuade les entreprises privées d’en assurer la production. L’Etat est ainsi amené à assurer le financement de la production de ce type de biens. Les biens collectifs deviennent alors des biens publics. Ils concernent entre autres l’éducation, la défense etc. Soulignons qu’il n’y a pas toujours égalité entre biens collectifs et biens publics. Ainsi, l’éducation, classée comme bien collectif, est parfaitement divisible d’où le fait que sa production puisse être assurée par le secteur privé.

Conclusion

L’intervention de l’Etat dans la sphère économique est-elle nécessaire ? Cette question oppose les conceptions libérales et keynésiennes. Pour les premiers, l’Etat ne doit pas intervenir et se limiter à jouer un rôle de gendarme. Pour les seconds, l’Etat a un rôle actif à jouer dans l’activité économique. Dans cet ordre d’idées, l’allocation des ressources, la redistribution et la stabilisation sont les fonctions reconnues à l’Etat. La dernière fonction renvoie au rôle de l’Etat en matière de politique économique. L’Etat joue enfin un rôle dans la fourniture des biens collectifs et la résolution des externalités.

CHAPITRE 7 : LES RELATIONS ECONOMIQUES INTERNATIONALES

Les échanges économiques internationaux recouvrent à la fois des échanges de marchandises, de services, de capitaux et de monnaies entre les différents pays. Les échanges internationaux sont traditionnellement considérés comme étant limités aux seuls échanges des biens et services ; les échanges de capitaux et de monnaie constituant, pour leur part, des flux financiers.

1. La balance des paiements

La balance des paiements est un compte qui enregistre les transactions et les règlements (à caractère économique et financier) effectués au cours d’une période (généralement l’année ou le trimestre) entre les résidents d’un pays et les résidents des autres pays. La balance des paiements retrace donc l’ensemble des flux entre résidents et non-résidents durant une période donnée. Les flux économiques et financiers entre résidents et non-résidents sont répartis dans la balance des paiements en distinguant le compte courant ou compte des transactions courantes, le compte capital et le compte financier.

Le compte des transactions courantes enregistre l’ensemble des échanges des biens et services avec l’extérieur. Il est divisé en quatre catégories ou quatre balances partielles à savoir la balance des marchandises ou balance commerciale, la balance des services ou balance des invisibles, la balance des revenus de facteurs ou de rémunération, la balance des dons et des transferts unilatéraux.

Le compte financier enregistre les différents types de flux financiers. Dans le compte financier, on distingue des flux d’investissements directs, des flux d’investissement de portefeuille, et des flux d’emprunts entre agents économiques résidents et non-résidents. Un investissement direct étranger correspond à la création ou à la reprise partielle ou totale d’entreprises à l’étranger. Les augmentations de capital sont également considérées comme des investissements directs. Un investissement de portefeuille correspond à un achat ou à une vente de titres (action et obligations) entre les agents résidents et non-résidents dans le but de réaliser une plus-value ou de récupérer des dividendes.

Le compte capital enregistre essentiellement les transferts en capital. Ce sont des transferts unilatéraux dans le sens où ils n’ont aucune contrepartie. Il s’agit en général des remises de dettes et de pertes sur créances accordées à ces pays.

2. Les théories de l’échange international

Les échanges internationaux sont-ils bénéfiques aux pays qui commercent entre eux ? Les économistes libéraux, partisans du libre-échange, considèrent que l’échange international est avantageux. Le libre échange est une doctrine économique qui vise à limiter les obstacles à la circulation des biens, des services et des capitaux entre les économies nationales. D’autres au contraire, avancent l’idée selon laquelle l’échange international n’est pas toujours sources d’avantages pour ceux qui le pratiquent et sont défenseurs du protectionnisme. Le protectionnisme est une doctrine économique qui a pour but de limiter l’accès au marché national pour les étrangers.

A°- Les explications libérales de l’échange international

Qu’est-ce qui justifie l’existence des échanges des biens et services entre les nations ? La première explication résulte de l’inégale dotation des facteurs naturels entre les nations. Les auteurs classiques (Adam Smith, David Ricardo) justifient les échanges internationaux au nom de l’allocation optimale des ressources au niveau mondial.

Plusieurs théories sont avancées pour expliquer l’échange international.

  • La théorie des avantages absolus d’Adam Smith (1776) ; chaque pays a intérêt à se spécialiser dans les productions pour lesquelles il possède un avantage absolu par rapport aux autres nations. Un avantage absolu est donc un avantage obtenu, dans l’échange international, par une nation lorsqu’elle vend à un prix inférieur à celui des nations concurrentes.
  • La théorie des avantages comparatifs de David Ricardo (1817) ; les nations sans avantage doivent se spécialiser dans les productions pour lesquelles elles connaissent le moindre désavantage. Un avantage comparatif est un avantage obtenu, dans l’échange international, par une nation lorsque, comparativement aux autres biens, son désavantage sur un bien, en terme de coût et de prix de vente est moindre.
  • La théorie des dotations en facteur de Hecksher (1919), Ohlin (1933) et Samuelson (1954) ; selon le théorème HOS ou loi des dotations en facteurs de production, les nations doivent se spécialiser dans les fabrications qui incorporent le facteur de production le plus important. Ainsi, les pays en développement exporteraient les produits incorporant beaucoup de main d’œuvre, alors que les pays développés exporteraient des biens nécessitant un capital important pour leur fabrication.
  • Les théories de la « demande représentative » de Linder (1961) ; Linder considère qu’un pays peut s’être constitué un avantage comparatif grâce à l’existence d’une demande intérieure importante (vaste marché intérieur).
  • Les théories de la « demande de différence » de Lassudrie-Duchêne (1971) ; si les échanges croisés portent sur des produits semblables, ceux-ci ne sont pas rigoureusement identiques mais bénéficient d’une « qualité de différence ». La participation à l’échange international permet ainsi d’améliorer la satisfaction des consommateurs qui peuvent choisir entre de nombreuses variétés d’un bien et permet également d’élargir le marché potentiel des entreprises.
  • Les nouvelles théories de l’échange international qui mettent l’accent sur les rendements croissants et la différentiation des produits.

B°- Les politiques protectionnistes

Le protectionnisme repose sur l’idée que le libre-échange n’est pas toujours source de d’accroissement des richesses. Il existe plusieurs pratiques protectionnistes. Celles-ci se divisent en mesures tarifaires et mesures non tarifaires. Une barrière tarifaire est une barrière douanière dont l’objectif est de limiter l’entrée des produits étrangers sur le territoire national en augmentant les droits de douane. Parmi les barrières non tarifaires, on distingue :

  • Les subventions à l’exportation ; une subvention à l’exportation est une aide publique versée à une entreprise qui vend une part de sa production à l’étranger.
  • Les quotas d’importation ; un quota d’importation est une limite légale des quantités importées.
  • Les restrictions volontaires aux exportations ; il s’agit d’un quota sur le commerce imposé non pas par le pays importateur mais par le pays exportateur.
  • Les règles de contenu local ; selon la règle de contenu local, une fraction donnée d’un bien final vendu dans un pays doit être produite sur le territoire national.

3. Les taux de change

Si des ménages veulent voyager en dehors de la zone CEMAC, vous aurez besoin d’échanger vos CFA contre des euros, livres sterling, des dollars ou une autre monnaie en fonction de votre destination. C’est la même chose pour les entreprises. Si un importateur veut acheter des machinesoutils en provenance du Japon par exemple, il devra obtenir des yens pour payer son fournisseur. Il est donc important pour les différents agents économiques de connaître la valeur d’une monnaie en termes d’une autre. Cette valeur est donnée par le taux de change. Le taux de change est le prix relatif d’une monnaie par rapport à une autre. Autrement dit, le taux de change entre l’Euro et le CFA est le nombre de CFA qu’il faut vendre pour acquérir un Euro. En général, on distingue deux régimes de taux de change : le régime de change fixe et le régime de change flexible. Dans un régime de change fixe (ou taux de change fixe), les gouvernements nationaux se mettent d’accord pour maintenir la convertibilité de leur monnaie à un taux fixe. Dans un régime de taux de change flottant, le taux de change fluctue librement par le jeu de l’offre et de la demande sans aucune intervention des banques centrales.